L’oeuvre de Benoit Huot évoque tout à la fois les féeries de l’enfance et les rituels les plus flamboyants de l’Asie ou de l’Amérique du Sud. Ces curieux animaux réalisent la synthèse monstrueuse de la taxidermie et de l’art du carnaval : des perles et des tissus chamarrés avec les sobres prunelles des bêtes figées pour l’éternité.

Dans son fabuleux bestiaire, l’Egypte rencontrerait le Morvan et la Suisse les terres Dogon, comme si dans une réflexion que n’aurait pas désavouée Mircea Eliade, un syncrétisme de toutes nos croyances, même les plus secrètes, se développait, souvent à leur insu. Sorte d’unité anthropologique qui justifierait toutes les audaces formelles de ce magique assembleur.

Car c’est bien de greffes qu’il s’agit ici, et si Descartes, dans sa conception de l’imaginaire, définit celui-ci comme une faculté d’assemblage incongru d’éléments qui, pris un par un, ont tous leur place dans le réel, à n’en point douter Benoit Huot a retenu la leçon, même si il la pousse encore plus loin.

Plus loin, car il indique aussi, en un horizon qui doit plus à Castaneda qu’à l’auteur des Méditations métaphysiques, que ces objets sont « chargés », comme le sont les masques « dansés », ceux qui ont en eux un peu de cette puissance de vie qui se manifeste dans l’univers et qu’ils sont censés incarner.

Mêlant foi populaire et pensée magique, cet artiste nous présente des travaux qui, dans tous les sens du terme, invitent au tête à tête. Il faut apprendre à les voir et non les regarder, à savoir saisir ce qu’il y a en eux de puissance à l’oeuvre.

On ne peut lire les travaux de Benoit Huot comme des plaisanteries colorées, pas plus qu’on ne peut résumer les aurochs de Lascaux à des ancêtres du papier peint.